Non conventionnée. Remboursement des séances : la face cachée

Pourquoi la majorité des psychologues s’oppose aux dispositifs de remboursements annoncés par E. Macron le 28 Septembre 2021 ? 

Conséquences pour le patient :

Un parcours complexe pour accéder à une prise en charge remboursée :

  1. Prescription d’un bilan par le médecin généraliste (MG). Ceci revient à une mise sous tutelle par des médecins, déjà débordés, qui n’ont pas toujours de connaissances en matière de psychopathologie, mais aussi à l’obligation pour le patient d’exposer ses difficultés à différents interlocuteurs.
  2. Bilan auprès du psychologue
  3. Retour du patient avec son bilan auprès du MG 
  4. Prescription du MG de 10 séances (ou 8)
  5. Séances avec le psychologue 
  6. Si 10 (ou 8) séances sont insuffisantes : retour auprès du MG pour prescription d’un bilan auprès d’un psychiatre
  7. Bilan auprès du psychiatre (dans les grandes villes, les délais d’attente pour un premier rdv sont extrêmement longs, ce qui implique nécessairement une grande interruption de la thérapie avant la prescription des séances supplémentaires)
  8. Retour du patient auprès du MG avec le compte rendu du psychiatre
  9. Prescription de 10 (ou 8) autres séances auprès du psychologue
  10. Séances avec le psychologue
  11. Et après ?  

Un véritable parcours du combattant et un obstacle aux soins pour les personnes déjà en souffrance psychique. 

Une perte de la confidentialité : 

L’assurance maladie ainsi que votre médecin généraliste ont accès aux comptes rendus vous concernant, ce qui est contraire au code de déontologie des psychologues qui sont tenus au secret.

Un dispositif excluant :

Ce dispositif de remboursement concerne uniquement les troubles anxieux et les dépressions légères. Toutes les personnes en souffrance psychique qui ne rentrent pas dans ces catégories ne bénéficient pas d’un remboursement.  

Conséquences pour le psychologue :

Une rémunération au rabais :

  • Qui ne correspond pas au niveau d’études des psychologues (BAC +5 à BAC+8)
  • Qui ne permet pas aux psychologues de vivre correctement de leur métier. 

En l’état, les psychologues qui accepteront d’être conventionnés et donc de vous recevoir « gratuitement » devront réduire leurs honoraires de moitié. Il se trouve que des structures de soins psychologiques pour tous existent déjà : les CMP, les CMPp, les SESSAD, les ITEP, les hôpitaux de jour… Alors pour quelles raisons s’acharner à fermer ces services, à ne pas leur donner les moyens humains et matériels ? Pourquoi ne pas embaucher en masse des professionnels qualifiés dans ces structures, au lieu d’ «ubériser» les psychologues en libéral ?

Accepteriez-vous de travailler de la même manière que d’habitude en divisant vos revenus par 2 ?

Un épuisement psychologique :

Si les psychologues souhaitent vivre décemment de leur métier, ils/elles devront enchaîner au moins 15 consultations par jour (pour des séances d’une durée de 20 à 30 minutes maximum). Or, chaque séance est coûteuse émotionnellement et un psychologue impliqué ne peut pas s’investir correctement à un tel rythme sans dommage pour ses patients et pour lui-même.

Conséquences sur la prise en charge du patient :

Une prise en charge moins efficiente et potentiellement maltraitante :

– Un psychologue n’a pas la même disponibilité psychique s’il reçoit 7 patients par jour que s’il enchaîne 15 consultations. La prise en charge en est donc fortement affectée. Rappelons que la prise en charge ne s’arrête pas à la fin de la séance. Une fois celle-ci terminée, votre psychologue repense aux éléments que vous avez apportés en séance, il prend des notes, réfléchit aux objectifs thérapeutiques et à la prise en charge la plus adaptée… Ce temps-là sera forcément gravement amputé car se rajouteront les télétransmissions pour la CPAM et les comptes rendus pour les médecins généralistes et psychiatres, tout cela réduisant naturellement à 20 minutes le temps d’une consultation.

– Afin de proposer la meilleure prise en charge possible à leurs patients, la majorité des psychologues paient des supervisions et se forment continuellement via des séminaires, colloques, formations… Cela a un coût financier et nécessite du temps. Avec une rémunération au rabais et un soin à la chaîne, tous ces investissements deviendront impossibles et la prise en charge des patients en sera affectée.

– Le temps pour recevoir un patient convenablement varie entre 45 minutes et 1 heure en moyenne. Avec une rémunération à 30€ et les lourdeurs administratives du dispositif, le temps de consultation sera considérablement réduit (20 à 25 minutes d’entretien maximum). Cela rendra nécessairement la prise en charge moins efficace, voire maltraitante pour les patients.

Ce que les psychologues demandent : 

– Un accès aux psychologues sans prescription médicale pour des soins psychiques accessibles à toute personne en souffrance psychique  et respectant la confidentialité.

– Un remboursement décent  (la moyenne des consultations étant actuellement entre 50 et 70€) ou une possibilité de dépassement d’honoraire. Les consultations sans dépassement d’honoraire seraient donc réservées aux patients aux revenus modestes. Sachant que la plupart des psychologues appliquent déjà des tarifs préférentiels à leurs patients en difficulté financière.

– Un dispositif de remboursement qui inclut toute personne en souffrance psychique, quelle que soit sa problématique..